Cela ne vous a pas échappé, 2020 est une année électorale. Et si la politique est un milieu dans lequel le travail collaboratif devrait être systématique pour répondre aux aspirations de tous les citoyens, en pratique c’est souvent loin d’être le cas.
Dans une petite commune de ma région, une équipe a décidé de se lancer dans la campagne pour les élections municipales. Ce petit groupe se démarque par sa volonté de mettre en pratique la démocratie participative dans le fonctionnement de la mairie. De manière très cohérente, le programme de campagne et la communication sont co-construits en associant tous les membres de la liste, plutôt que de concentrer les décisions entre les mains d’une ou deux personnes.
Mais cette méthode de préparation de la campagne a rapidement rendu indispensable la présence d’un facilitateur. Je les accompagne donc depuis début janvier très régulièrement : chaque semaine, trois rencontres de deux heures. Et c’est un défi pour plusieurs raisons…
Le rythme tout d’abord est très soutenu. La proximité des rencontres m’oblige à travailler vite : fixer l’objectif de la rencontre du lendemain avec le candidat tête de liste, concevoir des ateliers différents des rencontres précédentes pour éviter la routine, prévoir le matériel, animer la rencontre, rédiger et publier un compte rendu dès le matin suivant, c’est un peu sportif ! Mais tellement formateur…
Et parce qu’une campagne politique est une course incessante, le groupe est aussi soumis aux annonces des autres listes, aux articles de presse qui appellent une réaction, aux conseils reçus d’un soutien plus expérimenté… Il arrive alors que l’objectif fixé la veille d’une rencontre évolue au dernier moment, et il faut passer en mode « facilitation improvisée ». Mais le terme n’est pas vraiment exact… Il s’agit plutôt de rester serein pour choisir au pied levé l’atelier qui sera le plus adapté. Ça aide aussi d’emporter systématiquement ma « caisse à outil » de facilitateur, 40 litres d’objets en tout genre dont j’ai un peu parlé ici.
Parmi les ‘dangers’ qui guettent le groupe, la dispersion est celui auquel le facilitateur doit veiller le plus, je crois: la quantité importante de tâches à réaliser en quelques semaines est une tentation permanente à se perdre en chemin. Une fois la rencontre lancée, avec son objectif bien défini, j’évite au groupe les ‘sorties de route’ : limiter la durée du point-info pour maximiser le temps de travail, recadrer en douceur toute digression pendant les échanges, éviter que la pause conviviale ne s’éternise… Je suis un peu l’empêcheur de tourner en rond, pour ne pas perdre le cap 😉
Une autre caractéristique de cette mission est liée aux participants des rencontres: il y a un noyau dur, quasiment toujours présent, et d’autres personnes qui viennent de façon moins fréquente. Et très souvent une ou deux nouvelles personnes qui rejoignent la liste, parce qu’elle n’est pas finalisée. Comme le rythme (fréquent et continu) empêche de gérer des inscriptions, je découvre en direct qui est là et j’adapte les ateliers au nombre de personnes et à leur profil, en rendant possible l’alchimie entre ceux qui découvrent le mode de travail, et ceux qui s’y sont habitués depuis plusieurs séances.
La diversité des membres du groupe, d’ailleurs, c’est aussi une particularité dans cette mission. En dehors d’un point commun fort, l’attachement à leur ville, il y a de grands écarts entre les novices en politique et les élus de longue date, les pro’ de l’argumentation et ceux qui avancent à l’instinct, les revendicateurs et les discrets…
Mais cette variété des êtres humains, c’est bien ce qui est le plus épatant quand elle devient une source d’inspiration pour bâtir ensemble un projet solide. Et la facilitation y trouve clairement tout son sens !