Depuis 2015, j’interviens comme formateur dans différentes filières de l’enseignement supérieur. C’est une activité que je fais grandir au fil des années, car j’aime transmettre aux jeunes ce que j’ai pu apprendre dans mes expériences professionnelles successives. Cela me semble essentiel aussi parce qu’ils et elles seront tout simplement ‘aux manettes’ pour façonner le monde de demain. Et comme j’ai la conviction qu’il manque une bonne dose d’intelligence collective dans les relations professionnelles, je me dis que ce sont ces jeunes de 20 ans qu’il faut sensibiliser, pour que les bonnes pratiques se répandent petit à petit.
En un peu plus de 5 ans, 800 étudiants ont participé à l’un de mes cours, dans différentes matières. Un peu de Gestion de l’innovation et de Découverte du monde de l’entreprise, mais les deux cours principaux sont dédiés à la Gestion de projet et à l’Intelligence collective. C’est bien sûr ce dernier module que je développe de plus en plus, pour expliquer comment chacun peut devenir facilitateur lorsqu’il accompagne un groupe. En fonction des écoles où j’interviens, ce cours se déroule sur trois journées entières consécutives, ou parfois seulement deux. Et dans d’autres filières je glisse une journée de sensibilisation sur ce sujet au cœur d’un cours plus large (c’est par exemple le cas dans les trois jours de Découverte du monde de l’entreprise dont je consacre un jour à la facilitation).
Mais quelle que soit la durée totale, j’applique toujours la même recette : une petite pincée de théorie, une grosse dose d’ateliers facilités, et un travail final où ce sont les étudiants qui mettent en pratique. Le bon cocktail, c’est environ 10% +70% + 20%. Les ateliers que j’organise pour eux sur des sujets variés (« comment concevoir le campus idéal? », « Comment améliorer le travail en visio ? », « Comment réinventer des objets du quotidien ? », …) me permettent de leur faire découvrir concrètement les différentes techniques et les outils du facilitateur. Nous prenons le temps après chaque atelier de le ‘décortiquer’ pour comprendre ce qui était différent, et en quoi tel outil ou telle consigne a pu aider le groupe à travailler de façon collective.
C’est assez étonnant de voir les étudiants d’abord sceptiques le premier matin quand ils ne connaissent que l’intitulé du cours, puis surpris par le contenu beaucoup moins formel que ce à quoi ils sont habitués, et de plus en plus intéressés quand ils comprennent que le défi est à leur portée : ‘même eux’ peuvent aider un groupe à collaborer vraiment.
Lors de la dernière demi-journée je les mets donc à contribution: en petits groupes de trois, ils doivent concevoir un atelier pour faire travailler les autres étudiants, préparer le matériel nécessaire, et penser à tous les petits détails qui vont permettre au collectif de se révéler. La phase d’animation est intense, nous enchaînons quatre ou cinq ateliers, les étudiants sont tantôt animateurs tantôt participants. Et ils comprennent alors que le temps passé à concevoir l’atelier porte ses fruits quand le groupe collabore, construit, sans ignorer les plus timides. De mon côté, je repère ce qui a bien fonctionné et ce qui aurait besoin d’être amélioré pour le leur partager, mais je prends surtout beaucoup de plaisir à observer ces étudiants qui se retrouvent dans mon rôle de facilitateur.
Le bilan qui clôt ce cours est toujours un bon moment de partage, avec des jeunes qui avouent souvent avoir découvert que l’on pouvait travailler différemment. Et que c’était même possible en sortant de leur zone de confort, où ils ont l’habitude de constituer des groupes par affinité, souvent identiques. Pour la plupart, c’est une découverte !
Aujourd’hui, en janvier 2021, le compteur des étudiants que j’ai formés à la facilitation sur plusieurs jours atteint quasiment 200, et 250 autres qui ont reçu une initiation d’une journée. Et comme j’ai pu susciter l’intérêt d’une nouvelle école cette année, c’est près de 200 étudiants de plus (l’ensemble des promos de l’école) qui découvriront que l’intelligence collective s’apprend !!